Nous ne voulons pas être (re)inséréEs, nous ne voulons pas être prévenuEs, nous voulons des droits !

Alors qu’il y a moins d’un mois, la ministre des droits des femmes a fait pression sur la sénatrice Esther Benbassa afin qu’elle retire de l’ordre du jour sa proposition visant à abroger le délit de racolage public, Najat Vallaud-Belkacem se rappelle aujourd’hui que le gouvernement s’est engagé à abroger ce délit.
Nous pourrions nous en réjouir. Toutefois…
Cette déclaration fait suite à la remise à la ministre d’un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), Prostitutions : enjeux sanitaires.
Dans la synthèse de son rapport, l’IGAS souligne que les conditions d’exercice de la prostitution sont multiples, que cette activité ne concerne pas exclusivement les femmes, qu’il n’existe pas de chiffres fiables en la matière, que les origines des violences sont diverses, que l’isolement et la clandestinité augmentent les risques de contamination au VIH/sida, que les travailleurSEs du sexe doivent être reconnues comme des acteurs/trices de prévention, que « la reconnaissance et l’effectivité des droits constituent des conditions indispensables pour la prévention, le suivi médical et les soins des personnes qui se prostituent » et qu’au regard de la diversité des situations, une politique spécifique de la prostitution n’est pas adaptée.
Ces conclusions convergent avec nombre de celles faites par nous, travailleurSEs du sexe, et nos alliéEs. Pourtant, tout en garantissant faire sienne certaines des recommandations contenues dans ce rapport, la ministre persiste à vouloir conserver la question du travail sexuel dans son pré-carré, en l’inscrivant dans le cadre d’une mission, certes interministérielle, pour la protection des femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains.
Ce faisant, elle persiste à percevoir le travail sexuel comme une violence faites aux femmes et continue à véhiculer l’amalgame entre travail sexuel et traite des êtres humains.
Tout en simulant un intérêt pour les questions de santé, elle ne renonce pas clairement à la pénalisation des clientEs, alors même que le rapport, suivant en cela le Conseil national du sida, souligne la nécessité, non de leur répression, mais de campagnes de prévention sanitaire à leur égard.
La ministre présente ce rapport comme dessinant « les contours d’un large plan pour l’insertion sociale et professionnelle des prostituées et la prévention de la prostitution » alors qu’il est question de santé.
Par ses déclarations intempestives sur sa volonté de voir disparaître la prostitution, la ministre a mis en danger non seulement la santé des travailleurSEs du sexe, mais également leur sécurité et leur vie. Elle continue donc sur sa lancée, en nous traitant, ni plus ni moins, d’inadaptéEs sociales/aux.
Nous exigeons :

  • l’abrogation immédiate et sans condition du délit de racolage public ;
  • la décriminalisation du travail sexuel ;
  • une lutte effective contre le travail forcé, l’exploitation, la servitude et la traite à ces fins ;
  • la mise en place d’un groupe de travail associant les travailleurSEs du sexe, leurs alliéEs et tous les ministères concernés.

http://estherbenbassa.eelv.fr/une-senatrice-eelv-promet-une-proposition-de-loi-abrogeant-le-delit-de-racolage-passif-afp-171212/

http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/124000667/0000.pdf

http://www.cns.sante.fr/IMG/pdf/2010-09-16_avi_fr_prevention-3.pdf

Sur la violence des discours abolitionnistes : https://strass-syndicat.org/wp-content/uploads/2012/12/dp-version-finale2.pdf

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