Aujourd’hui a lieu un rassemblement contre l’homophobie, à l’initative d’Act up Paris, et soutenu par de nombreuses associations, groupes militants et partis politiques. Si nous saluons cette initiative, qui nous permettra de nous visibiliser et de reprendre l’espace public en cette période tristement marquée par une remontée de l’homophobie, et que nous affirmons bien évidemment notre soutien au mariage pour touTEs, nous avons cependant refusé la prise de parole qui nous était proposée lors de ce rassemblement.
Accepter cette prise de parole aurait été accepter de prendre la parole aux côtés du Parti de Gauche et du Parti Communiste Français. Nous n’avons pas souhaité nous inscrire dans un processus de légitimation de la parole de ces partis sur la question de l’homophobie. En tant que syndicat des travailleurSEs du sexe, qui compte en son sein de nombreuses personnes LGBT, nous refusons la légitimité de partis se revendiquant abolitionnistes en ce qui concerne la lutte contre l’homophobie.
Les discours abolitionnistes se fondent en effet sur une diabolisation du travail sexuel et une psycho-pathologisation des travailleurSEs du sexe usant des mêmes ressorts que les discours homophobes : caution par quelques gays ou putes ayant intériorisé le stigma au point de se détester elles et eux-mêmes, assimilation à la pédophilie, explications du choix d’opter pour certaines pratiques sexuelles par une enfance probablement incestueuse, volonté de « réadaptation » (à l’hétérosexualité, au travail acceptable), discours haineux en tous genres. Et tout cela, le plus souvent, au nom des meilleures intentions du monde, et sous couvert d’agir pour notre bien et pour celui de la société, puisque légitimer nos vies constituerait la pire des menaces envers elle.
Les partis de gauche par ailleurs dénoncent sans cesse la « marchandisation du corps » ; argument au nom duquel les homophobes diabolisent la PMA et la GPA… Nous aimerions les entendre hurler avec la même hargne contre la transphobie d’Etat, qui, en faisant du changement d’état civil des personnes trans’ un parcours difficilement tolérable pour les personnes concernées, les prive du droit de choisir leur activité professionnelle.
Parmi les travailleurSEs du sexe, on compte en effet beaucoup de personnes LGBT : aussi, en soutenant des lois qui vont rendre l’exercice du travail sexuel plus dangereux, en tenant des discours stigmatisant, c’est donc directement à une partie de la population LGBT que ces partis s’en prennent et mettent sciemment en danger. Alors que le PG et le PCF soutiennent d’un côté l’acquisition de droits pour les personnes LGBT, ils réclament d’un autre côté plus de lois d’exception qui participent toujours plus à l’exclusion de ces mêmes personnes du droit commun.
Alors que l’homophobie grandissante ces dernières semaines suscite et à juste titre une vive indignation, le meurtre d’une travailleuse du sexe il y a quelque jours est passé totalement inaperçu. Il ne s’agit bien évidemment pas d’opposer ces combats, bien au contraire : notre soutien au combat d’Act up Paris pour l’égalité des droits est plus entier que jamais, et nous comprenons que la convergence des luttes peut parfois mériter des concessions. Cependant, ce n’est pas à nous, travailleurSEs du sexe, déjà victimes de nombreuses violences et discriminations, de faire ces concessions, mais bien aux partis qui prétendent représenter les intérêts des minorités.
MISE A JOUR. 19h49 : Suite à la décision du Parti de Gauche de ne finalement pas prendre la parole, le STRASS a donc pris la parole.