Abrogation immédiate et complète de l’infraction de racolage public

Alors que la proposition de loi déposée par la sénatrice Esther Benbassa va être discutée jeudi en séance publique au Sénat, le groupe socialiste du Sénat continue ses petits arrangements avec les promesses de campagne du candidat Hollande.
La proposition de loi avait été déposée une première fois en novembre dernier avant d’être retirée à la demande de la ministre des droits des femmes au prétexte qu’elle attendait le rapport de l’IGAS sur les enjeux sanitaires des prostitutions. Elle a été à nouveau déposée pour être examinée le 28 mars prochain. Malgré l’adoption à la quasi-unanimité du texte en commission des lois, le groupe socialiste s’acharne à le dénaturer en déposant des amendement et motion qui vont à l’encontre de la promesse d’abroger le délit de racolage public. Après avoir tenté un renvoi devant la commission des lois du Sénat, il s’oriente maintenant, semble-t-il, vers un retour à la situation antérieure à 2003 en instituant à nouveau une contravention de racolage actif. L’objet de l’amendement est clairement énoncé : « il semble nécessaire d’assurer que le racolage ne disparaisse pas de notre arsenal juridique ». Quittant ainsi l’hypocrite posture pseudo-abolitionniste, le groupe socialiste s’affiche ainsi clairement dans une tendance prohibitionniste, considérant qu’il faut continuer à criminaliser les putes.
Parce qu’il est faux de croire qu’il s’agirait de diminuer la pression pénale pesant sur les travailleurSEs du sexe. L’expérience des 10 ans d’application du délit de racolage public nous permette d’affirmer sans ambages que la situation ne changera pas pour les travailleurSEs du sexe. La Cour de cassation avait essayé de circonscrire l’application de ce délit. Cela n’empêche en rien les forces de l’ordre d’user et d’abuser du pouvoir de contrôle qui leur est ainsi donné, se livrant ce faisant à un harcèlement institutionnalisé.
L’infraction de racolage, qu’il s’agisse d’un délit ou d’une contravention, visant le racolage passif ou actif, est une atteinte aux droits des travailleurSEs du sexe. En plus d’être stigmatisante, elle met en danger leur santé, leur sécurité, leur vie, en les éloignant des structures de prévention, de soins et d’accès aux droits. En outre, elle expose particulièrement les migrantEs aux violences, notamment policières. Loin de favoriser la lutte contre le travail forcé, la servitude, l’esclavage et la traite à ces fins, le maintien de l’infraction de racolage public au sein de l’arsenal juridique a pour principal objet de lutter contre la prostitution, en particulier des migrantEs.
Outre cet amendement, un amendement visant à pénaliser les clientEs a été déposé par la sénatrice Chantal Jouanno (dont la position contre le travail sexuel n’est plus à démontrer, alors même qu’elle est rapporteure de la mission sur la situation sociale des personnes prostituées). Nombreuses sont les organisations de travailleurSEs du sexe et d’alliéEs soutenues par des experts scientifiques indépendants à dénoncer le projet de pénaliser les clientEs et d’interdire toute prostitution qui ne ferait qu’aggraver la situation des travailleurSEs du sexe en les exposant davantage à toute forme de violence ou d’abus.
Toute criminalisation directe ou indirecte du travail sexuel a des conséquences réelles et catastrophiques sur les travailleurSEs du sexe. Il est indigne que le parti socialiste soutienne de la sorte la persistance de mesures dangereuses pour la vie, la santé, la sécurité des personnes et souhaite en adopter de pires.
 
Nous exigeons :
– l’abrogation immédiate et sans condition du délit de racolage public ;
– la fin immédiate de toute criminalisation et de toute répression du travail sexuel ;
– l’arrêt de l’instrumentalisation de la lutte contre la traite à des fins racistes, sexistes et putophobes ;
– l’application du droit commun aux travailleurSEs du sexe, notamment dans le cadre de la lutte contre les violences et les abus.
 
Contact Presse
Morgane Merteuil – 06.63.58.45.23
 
 


http://www.seronet.info/article/francois-hollande-le-sida-ne-doit-pas-seulement-concerner-ceux-qui-sont-porteurs-de-cette

http://www.igas.gouv.fr/spip.php?article291

http://www.senat.fr/amendements/2012-2013/440/Amdt_2.html

http://www.senat.fr/amendements/2012-2013/440/Amdt_1.html

Cass. Crim., 25 mai 2005, n° 04-84769 et 04-84714.

Commission citoyens-justice-police, De nouvelles zones de non-droit. Des prostituées face à l’arbitraire policier, 2006, http://www.ldh-france.org/IMG/pdf/prostituees_arbitraire_policier.pdf.

Commission citoyens-justice-police, Un harcèlement institutionnalisé. Les prostituées chinoises et le délit de racolage public, 2013, http://www.ldh-france.org/IMG/pdf/ccjp_rapport_final_un_harcelement_institutionnalise_avec_annexes.pdf.

http://infos.fondationscelles.org/index.php?option=com_content&view=article&id=532%3Ala-prostitution-n-est-ni-un-metier-ni-un-mal-necessaire&catid=103%3Afondation-scelles-infos-n-22-fevrier-2013&Itemid=232&lang=fr

http://www.senat.fr/presse/cp20130123.html

https://strass-syndicat.org/wp-content/uploads/2011/06/dossier_de_presse_penalisation_clients1.pdf,http://www.planning-familial.org/communiques-de-presse/oui-peut-etre-feministe-et-contre-la-penalisation-des-clients-005273, http://www.npa2009.org/content/communiqu%C3%A9-du-npa-prostitution-contre-lhypocrisie-de-la-p%C3%A9nalisation-des-clients.

http://www.cns.sante.fr/IMG/pdf/2010-09-16_avi_fr_prevention-2.pdf, http://www.undp.org/content/dam/undp/library/HIV-AIDS/Governance%20of%20HIV%20Responses/Commissions%20report%20final-FR.pdf.

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